À l’occasion du centenaire de la loi canadienne sur le droit d’auteur, nous avons demandé à Adrian Sheppard, directeur du Bureau du droit d’auteur de l’Université de l’Alberta, de nous faire part de ses réflexions et de ses pensées.
Pour rappel, vous pouvez trouver plus d’informations sur l’ensemble des services et des ressources en matière de droit d’auteur destinés aux professeurs, au personnel et aux étudiants de l’Université de l’Alberta sur le site Web du Bureau du droit d’auteur. Pour aller plus loin, consultez les modules d’enseignement “Opening up Copyright ” (en anglais). Pour toute question spécifique relative au droit d’auteur, contactez le personnel du Bureau du droit d’auteur.
La loi canadienne sur le droit d’auteur à 100 ans
On m’a récemment rappelé que l’année 2024 marquait le centenaire de la loi canadienne sur le droit d’auteur. En 1921, le Parlement a adopté la première loi canadienne sur le droit d’auteur, qui est entrée en vigueur en 1924. J’ai jeté un coup d’œil à la loi historique pour voir si les perspectives sur le droit d’auteur avaient changé au cours du siècle dernier.
La perspective actuelle sur la loi sur le droit d’auteur, du moins telle qu’elle est interprétée par la Cour suprême du Canada, est probablement mieux décrite dans l’arrêt Théberge 1de 2002.
La loi sur le droit d’auteur est généralement présentée comme un équilibre entre la promotion de l’intérêt public dans l’encouragement et la diffusion des œuvres artistiques et intellectuelles et l’obtention d’une juste récompense pour le créateur…. (paragraphe 30)
Que révèle la version originale de la loi sur la façon dont cette perspective de la loi sur le droit d’auteur maintient l’équilibre ?
Aujourd’hui, l’utilisation équitable joue un rôle central dans le maintien de l’équilibre entre les droits du créateur et les droits de l’utilisateur en matière de droit d’auteur. Il semble qu’elle ait joué un rôle similaire dès le départ. La version de 1924 stipule explicitement que “l’utilisation équitable d’une œuvre à des fins d’étude privée, de recherche, de critique, de compte rendu ou de résumé de journal” ne constitue pas une violation du droit d’auteur. Dans la loi actuelle sur le droit d’auteur, la définition de l’utilisation équitable et son rôle restent largement inchangés.
J’ai également été intéressée par la manière dont la loi historique traitait de l’utilisation de matériel protégé par le droit d’auteur par les établissements d’enseignement. La version de 1924 autorise “la publication d’un recueil… destiné à l’usage des écoles… de courts passages d’œuvres littéraires publiées… sur lesquelles le droit d’auteur subsiste” (art. 16(1)(iv)). (art.16(1)(iv)). Ce qui est explicitement autorisé en vertu de cette disposition de 1924 est très différent de ce qui peut être légalement distribué aux étudiants en vertu du principe de l’utilisation équitable aujourd’hui. Néanmoins, cela démontre que, même dans les années 1920, la mise à disposition limitée d’œuvres protégées par le droit d’auteur à l’usage des étudiants était considérée comme importante pour l’intérêt public.
L’une des préoccupations actuelles concernant l’équilibre du droit d’auteur est de veiller à ce que les œuvres protégées par le droit d’auteur restent accessibles au public une fois qu’elles ne sont plus disponibles dans le commerce. La section sur les “licences obligatoires” (article 12 dans la version de 1924 de la loi) répond à une préoccupation similaire.
En 1924, en vertu de la disposition relative aux licences obligatoires, à tout moment après le décès de l’auteur, si un détenteur de droits d’auteur a refusé au public une œuvre déjà publiée, “le détenteur des droits d’auteur peut être contraint d’accorder une licence de reproduction de l’œuvre“, sous réserve de conditions raisonnables. Il ne fait guère de doute que cette disposition datant de 1924 vise à protéger l’intérêt public dans la diffusion des œuvres, maintenant ainsi l’équilibre du droit d’auteur. La disposition correspondante de la loi actuelle ne s’applique que dans les cas où le titulaire du droit d’auteur est introuvable (article 77), bien qu’elle puisse s’appliquer du vivant de l’auteur.
Le monde du droit d’auteur a beaucoup changé au cours des 100 dernières années, mais les exemples proposés ici, tirés de la version de 1924, renforcent l’idée que l’équilibre entre les intérêts des créateurs et l’intérêt général a toujours été une perspective fondamentale pour le droit d’auteur au Canada. Il n’a jamais été aussi important de continuer à se battre pour sauvegarder l’intérêt du public à accéder aux contenus protégés
Nous remercions Adrian Sheppard, directeur du Bureau des droits d’auteur de l’Université de l’Alberta, d’avoir rédigé cet article.
Cet article a été traduit de l’anglais par Elisabet Ingibergsson. La version originale est disponible ici.
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